vendredi 7 juin 2013

Herstal: Non au stationnement payant et au PPP avec Besix Park : ne pas abandonner la gestion de l’espace public au privé !

Le 24 novembre 2011, le Conseil communal de Herstal avait voté avec 22 voix pour (PS/EPH) et 5 abstentions (MR/PTB/ECOLO) pour une concession conjointe de services pour l’exploitation du stationnement payant en voirie et l’exploitation de parcs de stationnement.
Ce 30 mai 2013  le conseil communal a voté la convention cadre qui liera la ville et Besix Park. C’est en fait l’étape juridique. La mise en œuvre du stationnement payant devrait démarrer dans quelques mois. Avant cela, probablement au mois de septembre, un règlement détaillant toutes les modalités pratiques devra encore être adopté. 
Besix Park gérera le stationnement dans un large périmètre qui s’étendra de Coronmeuse à la rue Clawenne et du boulevard à la rue Croix Jurlet. Il aura également la gestion du parking souterrain du nouvel hôtel de Ville, en cours de construction. Dans certaines rues, des horodateurs devraient faire leur apparition. 
«C’est Besix Park qui va s’occuper de tout, explique Frédéric Daerden. Il mettra du personnel pour effectuer des contrôles. Il placera les équipements. Une fois que le parking du nouvel hôtel de ville sera construit, il nous rachètera les places de parking. En retour, il espère avoir une capacité de chiffre d’affaires suffisante pour pouvoir couvrir ses frais de fonctionnement et avoir des bénéfices. En élaborant le règlement pratique, à nous de faire en sorte de répondre à ces exigences financières". (Ls 1/6/2013). 
Selon Daerden,  il est encore prématuré de parler de modalités pratiques. Mais en fait cette Convention public privé entre la ville de Herstal/Urbeo et Besix park engage la ville très loin.  La clé de répartition des les dividendes sera 3% la ville et 97% le privé. La convention est pour 40 ans de 2011 à 2051, avec un bénéfice espéré de 8 millions d'euros pour un chiffre d'affaires (sans TVA) pour la même période de 42 millions d'euros. Donc 42 millions à casquer par les usagers, soit une moyenne de 1 million par an. Besix Park a réalisé un chiffre d'affaires de 2 mia euros en 2012, et fait des constructions et services e.a. dans les monarchies pétrolières du golfe. L’entreprise gère aussi un des plus importants tours de parking à Anvers et le parking à Verviers.

Johan Vandepaer a très bien résumé les raisons pour refuser cette convention :

« 1.  Pour le PTB l’espace public doit être géré par le public et non pas par le privé.  Une gestion publique rend plus facile une discussion démocratique avec les riverains concernés.
2.  Il est question de parking payant pour les riverains (15-30 euros).  La convention parle d’un tarif riverains généralisé. C’est inacceptable : le parking payant est un taxe urbaine supplémentaire, surtout pour les habitants ne disposant pas de garage.
3.  Un parking payant au centre ne va pas du tout amener les gens ni vers le commerce local, ni vers les infrastructures du centre (maison communale, piscine, poste …). Le commerce du centre a déjà souffert de la durée des travaux. Un parking payant ne va certainement pas les sortir des difficultés, bien au contraire, cela va chasser les gens vers les grandes surfaces hors centre.
4. Le parking payant au centre et dans presque tout le bas de Herstal, ne résout pas les problèmes de mobilité de la ville, ni le problème global de stationnement important de la ville de Herstal. Une réflexion plus globale avec des parkings de dissuasion, des transports publics (multimodaux) accessibles et abordables est indispensable ».

Voici quelques éléments pour une réflexion plus globale.

Il est vrai que pour Tritel, auteur du plan communal de mobilité, le stationnement est une problématique … très problématique: « La demande actuelle est plus importante que l’espace disponible. Entre 125 et 160 places ont été perdues suite au réaménagement de l’hyper-centre. Le stationnement IPES se fait actuellement de manière sauvage et anarchique ; une grande partie des places actuelles se trouvent le long du Canal et vont disparaître. Demande de stationnement résidentiel élevé à Marexhe ».
Tritel suggèrait déjà des places de parking hors voirie. Mais entre ça et le projet Besix il y a une marge !
Il y a d’abord des arguments de principe: ce n'est pas à une société privée de gérer l'espace public. Herstal est une des villes les + pauvres de la province. Pas mal de gens habitent une maison ou appart sans garage. Imposer à cette population une charge supplémentaire d’un million par an est indécent. La Convention prévoit un tarif spécial riverains généralisé ! 
La Convention définit les principes de tarification suivants: « plus on se rapproche du centre, plus les tarifs doivent favoriser la courte durée et donc être progressifs; les Parcs de stationnement souterrains ou en enclos doivent proposer  des tarifs dégressifs pour permettre et favoriser la longue durée; plus un Parc de stationnement sera éloigné du centre-ville, moins les tarifs seront élevés afin de favoriser la très longue durée. Les tarifs relatif aux abonnements seraient adaptés en fonction de la localisation du Parc de stationnement suivant le principe : au plus près du centre ou des zones à forte rotation, au plus chers seront les abonnements dans une fourchette pouvant aller de 75,00 € à 100,00 € TVAC, sans préjudice d'une révision calculée en prenant en compte l'index de 2011; afin d’intégrer les Parcs de stationnement dans leur environnement il faudrait envisager de favoriser le stationnement des riverains via un tarif spécial riverains généralisé compris entre 15,00 et 30,00 € TVAC sans préjudice d'une révision calculée en prenant en compte l'index de 2011 ».

Abandonner toute maîtrise de la multimodalité dans les mains du privé

Quand on parle mobilité, il faut penser multimodalité. Cette convention parkings payants avec Besix revient à abandonner toute maitrise de la multimodalité dans les mains du privé. La zone concerné couvre quasi tout le bas de Herstal, délimité par le boulevard urbain - croix jurlet - clawenne - coronmeuse. Il faudra des P&R au terminus du tram à Coronmeuse. Il faut des parkings autour des gares de Herstal et de Milmort. En donnant le monopole à Besix on arrivera dans le meilleur des cas  à des situations où il faudra payer une redevance à Besix pour des places de parking P&R bon marché à Coronmeuse ou à la gare, et dans le pire des cas à un blocage complet par le ‘partenaire’ privé

Faire revivre le centre, ce n’est pas gagné d’avance

Ce partenariat enlève aussi à la Ville la maîtrise sur son nouveau centre.  La période des travaux de la nouvelle place a déjà été  une lourde épreuve pour le commerce au Centre. Aujourd’hui il faudra faire revivre le centre, ce qui n’est pas gagné d’avance.  Un nouveau plan de circulation et de parking est un lourd défi à relever. La mobilité est un aspect important pour l’implantation d’ « activités attractives ». Arrivera-t-on à briser la tendance lourde d’envoyer les gens dans des centres commerciaux à l’extérieur des villes, ou veut-on promouvoir des magasins de proximité? Veut-on tuer le peu de commerces qui restent au centre de Herstal par une stratégie de parking payant et les envoyer chez Carrefour ?

Partir d’une analyse des activités attractives  existantes ou à attirer.

Des villes comme Lille ont gagné le défi de revitaliser leurs faubourgs. Cela a un sens, mais cela ne va pas de soi. Une stratégie de mobilité et le stationnement doit partir d’une analyse des activités attractives  existantes ou à attirer.  Pour le hypercentre nous aurons la nouvelle
maison communale, piscine, hall omnisports, poste etc. Le point de gravité de ces points d’attraction se trouve en dehors de l’axe de la nouvelle place communale, mais avec un maillage fin piétonnier entre ces points d’attraction on pourrait rendre cette zone communautaire attrayante. Dans ce cadre-là se garer le long du boulevard pourrait devenir attrayant.
Le problème est qu’il y a sur la place même peu de points d’attractivité, à part le marché hebdomadaire. Comment assurer la vitalité de cet espace d’un hectare et demi ? Un système de parking à la périphérie, même s’il n’est pas encore entré dans les moeurs dans l’agglomération liégeoise, est accepté si les 200-300 mètres à faire à partir de ces parkings offrent un plus. Sinon, c’est la délocalisation garantie. Il est clair qu’il est hors de question de restaurer les places de parking perdus sur la nouvelle place communale. Mais Herstal a dans un rayon de quelques centaines de mètres autour du centre suffisamment d’endroits – et de friches - où l’on peut se garer.

Premières destinations: écoles et cliniques

En dehors de l’hypercentre, les premières destinations sont les écoles et les cliniques; et accessoirement encore ce qu’il reste de la FN. Selon Tritel, les écoles de Herstal comptent 9021 étudiants. Le gros se déplace en transport public, sauf à l'athenée (49% en bagnole) et au Collège Notre Dame (26% en voiture). Les écoles les plus fréquentées sont situées sur des voiries à fort trafic: l'IPES et l'Athenée, avec des vitesses inadaptées, et Saint Lambert dans la rue E. Dumonceau à fort trafic et avec des trottoirs étroits, devant et derrière. S’il y avait assez de parkings sur les boulevard urbain, on pourrait développer l’accès aux écoles situées le long de la rue principale à partir du boulevard. L’aménagement de Zénobe Gramme en voie rapide 70km, càd aménagé en 2 fois 3.5m au lieu de 2 fois 3m., cela représente 2 mètres d’asphalte en plus et cela a limité fortement la possibilité de parcage, en dehors des riverains. Ceci dit, il y a évidemment une solution toute simple : c’est de prendre une bande de circulation pour les besoins de parking.

Tram et réseau suburbain SNCB

Un gros problème est évidemment l’arrêt du tram à Coronmeuse. Il faudra bien réfléchir
comment restructurer un transport public performant à partir de ces nouveaux terminus. Et dans cette réflexion il faut intégrer des parkings de dissuasion à partir de ces points multimodaux et le réseau suburbain SNCB
Raoul Hedebouw a déjà déclaré en 2012: « La gare de Bressoux, Herstal et  Seraing sont des  maillons essentiels  pour la mobilité dans l’agglomération liégeoise. Tous les projets de la SNCB vont dans le sens de l’abandon de ces lignes locales, en contradiction totale avec l’article 10 du contrat de gestion 2008-2012 de la SNCB.  Pour décembre 2011 au plus tard, la SNCB devrait mettre sur pied des sociétés régionales de transport, un concept de transport intégré et orienté client, en ce compris l’éventuel développement d’un réseau suburbain autour d’Anvers, Gand, Liège et Charleroi.» Pourquoi n’arrive-t-on pas à imposer le respect de ce contrat ? A certains moments de la journée, on a 5 trains à l’heure qui vont en 11 minutes de Herstal à Liège Palais ou aux Guillemins. Mais à d’autres moments, c’est le néant. Une bonne liaison (piétonne) entre la nouvelle gare de Herstal et le centre pourrait être un élément de revitalisation important.
Remarque

Le Projet ville de Liège aussi vise à « optimaliser l’utilisation des parkings en ouvrage ».  Nous lisons p. 35 « Revoir la politique globale de stationnement via une extension  de la zone régulée et une promotion de l’utilisation des parkings  en ouvrage. Renforcer le contrôle et la surveillance du stationnement pour assurer son respect. p.36  Afin d’optimaliser l’utilisation des parkings en ouvrage, mettre en place une tarification intégrée avec les tarifs en voirie afin  d’orienter le stationnement moyenne durée vers le parking en  ouvrage ». 

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