mercredi 8 juin 2016

Le cœur historique de Herstal, revisité à l’aune de l’inventaire du patrimoine de Herstal



Il y a pour le moment  une petite expo à la Ruche à l'occasion de l'actualisation de l'inventaire du patrimoine de Herstal. Cette expo ne vaut pas le détour, mais si vous êtes dans le coin, jetez un coup d’œil. Mine de rien: on est riche! Tout est sur internet. Un beau travail de Flavio DI CAMPLI et de Bénédicte DEWEZ. Le vocabulaire est technique, mais retrouver un de ces 170 bâtiments retenus te fera regarder les rues de Herstal d’un œil nouveau.
Le 4 juin MPLP Herstal  a organisé une balade santé, à l’occasion de sa fête annuelle des gensd’abord. Voici une partie de cette balade, dans le cœur historique de Herstal, revisité à l’aune de cet inventaire, et avec les photos de l’Ipic. Les textes de l’IPIC sont en italique. J’ai parfois ajouté quelques commentaires issus de mes travaux de recherche.

La maison Lovinfosse

Place Licour 25-26, la maison Lovinfosse abrite le musée depuis 1972. « Intéressante maison de style traditionnel dont la partie de gauche est datée aux ancres de 1664 et la partie de droite, plus basse date du début du 18e siècle, le tout restauré au 20e siècle. Bâtiment caractéristique du style traditionnel mosan, de facture particulièrement soignée ».

La première pompe publique

Au centre de la place « l’ ancienne fontaine en calcaire de plan carré, datée de 1775 sur une de ses faces. Intéressant édicule couronné par une corniche moulurée et surmonté d'un grand vase en calcaire probablement refait au 19e siècle; un des côté est précédé d'un bac en calcaire dans lequel l'eau de la fontaine était récoltée ».

En 1774 que le conseil de la régence de Herstal (une sorte de conseil communal), « ému par le grand danger que connaît le quartier de la Licour à cause de la disette d'eau, réclama aux états de Liège l'établissement d'une pompe. En 1826, lors de l'installation des conduites d'eau alimentaire et des bornes-fontaines, l'administration communale a gardé pompe publique. En 1898, son existence fut sérieusement menacée, le conseil voulant plutôt une fontaine monumentale en remplacement de la vieille pompe. Heureusement, le manque d'argent empêcha la destruction de celle-ci ».
« Le  monument commémoratif en calcaire aujourd'hui dédié à la mémoire des héros herstaliens ayant participé aux deux premières Guerres mondiales a été inauguré en 1932 déjà. Imposant pilier dont une des faces sculptée présente un personnage féminin suivi de soldats ».
Le Banc de la Liberté au fond de la place n’est pas repris dans l’inventaire. Il a été érigé après la guerre  40-45, financé par souscription publique. Le charbonnage de la Grande Bacnure y avait souscrit certes par générosité patriotique ... et pour faire oublier sa collaboration (plus ou moins obligée) avec les autorités occupantes.

L’église de la Licour

L’Église Notre-Dame de la Licour, «  précédée d'une tour en briques reconstruite en 1677, restaurée en 1825 et coiffée d'une courte flèche à quatre pans. Dans le prolongement de la tour, une nef de six travées probablement reconstruite vers le milieu du 18e siècle avec remploi de maçonneries plus anciennes, en moellons de grès, percée d'oculi calcaires, flanquée de bas-côtés en briques et calcaire percés de grandes baies en plein cintre séparées par des pilastres de briques. Transept saillant en moellons de grès, tuffeau et calcaire, peut-être partiellement roman (12e siècle?) percé de hautes baies cintrée probablement du 19e siècle. Choeur à chevet plat partiellement roman lui aussi, en moellons de grès et chaînage en tuffeau et calcaire, flanqué de deux sacristies (19e et 20e siècles?). Restauration par
l'architecte Louis Habran en 1914, ainsi que le signale le chronogramme placé à l'intérieur au-dessus de l'entrée ».
L’inventaire ne mentionne pas la reconstruction de 1750, après un incendie en 1737. Pendant toutes ces années, les messes ont été dites à la chapelle Orémus. Lors de cette reconstruction on n’a gardé que quatre piliers qui étaient carrés au départ. Pour faire joli, on les a arrondis…Lors de la restauration de 1914, les terrassiers mirent à jour une partie du jubé primitif. Notre historien local M. Collart-Sacré était intervenu pour les sauvegarder, mais la fabrique d’église s’ingénia « à endormir la méfiance de la Commission royale des monuments. A l’intérieur de la nouvelle sacristie on a laissé subsister un coin perdu de maçonnerie masquée par un panneau massif » (cs tii p415).
« Entourant l'église Notre-Dame, cimetière partiellement cerné de murs en briques et accessible par une entrée flanquée de piliers calcaires. Il conserve de nombreux monuments funéraires des 19e et 20e siècles, certains de facture soignée, quelques croix de fonte et des tombes entourées de grilles en fer forgé ».
Le presbytère, accessible par le cimetière, « harmonieuse demeure de style néo-classique probablement construite à la fin du 18e ou au début du 19e siècle. En retrait dans une cour emmurée, double-corps de brique et calcaire, de cinq travées sur deux niveaux, coiffé d'une toiture d'ardoise à croupes et égouts retroussés. Façade symétrique, encadrée de harpes d'angles et percée de baies rectangulaires ».

La tour dite “Pépin”.

 Place Licour 13, «en retrait, la Tour Pépin est un vestige de l'ancien manoir Hanxeler ou château de Herstal, en grande partie détruit vers 1854 par M. Courard. Actuellement à l'abandon, cette construction a vraisemblablement été érigée à la fin du 16e siècle dans un style traditionnel mosan. Renforcée par des chaînages d'angle, la bâtisse en briques, calcaire, grès et tuffeau est coiffée d'un toit à deux versants à croupes d'ardoises; baies à croisée ou traverse sur piédroits chaînés. À la façade est, vestiges de jambages gothiques en calcaire. À l'angle sud-est, la chaîne d'angle en tuffeau est interrompue par un fût de colonne en calcaire dont un des tambours porte les armoiries de Hanxeler et Speis et la date de 1597.
Hanxeler était en fait un homme de paille de Guillaume I d’Orange  En 1561, suite à son mariage avec la fille protestante de l'électeur de Saxe, Guillaume change allégrement de religion. Le favori de Charles Quint devient persona non grata et ses biens sont confisqués en 1569 par le duc d’Albe. Dans ces biens, sa Seigneurie de Herstal. Guillaume met ces biens en gage auprès de Hanxeler pour 26.000 florins ; une opération qui empêchait l’Inquisition de mettre la main dessus. Ce François Hanxeler, chevalier de l'Ordre Teutonique depuis 1549,  s’attribue le titre de ‘seigneur gagiste de Herstal’ et y construit en 1575 un manoir. En 1603 lorsque la paix est revenue, Herstal retourne aux Nassau. La maison royale de Hollande porte toujours le titre de Seigneur de Herstal !
Place Licour 15 La Maison Courard a un double-corps bien conservé en brique et calcaire, de cinq travées sur deux niveaux, sous toiture d'ardoise à deux versants. La façade symétrique à l'architecture soignée est percée de baies à linteau déprimé. Un petit balcon agrémente la baie centrale de l'étage. Un décor original en calcaire, fait de redents et d'une frise d'arceaux en plein cintre, souligne la corniche. Une lucarne à encadrement chantourné ponctue le centre de la toiture ».
Juste à côté, Place Licour 11, « en retrait dans une petite cour, construction de style traditionnel édifiée au début du 18e s. Habitation de trois travées sur deux niveaux, élevée en briques et calcaire. Baies à linteau droit, autrefois à croisée, feuillure aux jours inférieurs. Les linteaux, traverses et seuils sont prolongés en larmier. À gauche, la porte occupe l'emplacement d'une ancienne fenêtre. Sous une frise dentée, trois jours de comble avec feuillure; linteaux et seuils prolongés en cordons. Toit à deux versants de tuiles mécaniques ».

La maison du Receveur des domaines du Prince Eveque.

Non repris dans l’inventaire (et pour cause : le bâtiment n’existe plus) la maison du Receveur des domaines du Prince Eveque. Le signal de départ de la révolution liégeoise a été donné ici, en démolissant cette maison le 17 août 1789, la nuit avant la prise de la Violette. Le gros des émeutiers venaient de la Préalle. Selon la cour de justice Herstal (séance juillet 1791) « quantités de personnes de la Préalle, tous armés de fusils, de sabres, de fourches se sont assemblées pour démettre les Bourgemestres »). Tremblez, Frédéric, pour que l’histoire ne se répète pas…
Les émeutiers de la Préalle n’ont pas démoli la maison de la Régence de fond en comble. Elle a servi de maison communale jusqu’en 1849, inauguration de la maison communale Place Jean Jaurès, agrandi en 1898. Ce déplacement a sûrement un rapport avec l’inauguration du canal Liège- Maastricht, lorsque les marais (Marexhe) qui bordaient la Laye ont disparus et que les bourgeois de Herstal ont investi dans des belles demeures le long de ce canal.

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